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Les paysages au fil du temps : Menglon enlève le haut.

10/08/1997

Les paysages au fil du temps : Menglon enlève le haut.

"Avant-après" dans Libération

https://www.liberation.fr/france-archive/1997/08/11/avant-apres-1-les-paysages-au-fil-du-tempsmenglon-enleve-le-haut-le-village-dans-la-plaine-s-est-dev_213137/

Avant-après (1). Les paysages au fil du temps.Menglon enlève le haut. Le village dans la plaine s'est développé, et celui de la colline a peu à peu disparu.
par Matthieu Écoiffier
publié le 11 août 1997 à 7h32

Il en va des paysages comme des visages. Un jour, on s'aperçoit

qu'ils ont vieilli. A partir de photos «avant, après», l'observatoire photographique du paysage du ministère de l'Environnement révèle les évolutions (1). La comparaison permet de tordre le cou aux idées reçues. Ainsi, après un siècle de reforestation, la France est plus boisée qu'au Moyen Age. Le désert vert menace.

L'observatoire a mis en place une «veille photographique» dans six départements. Chaque année, la place de village ou le rond-point sont photographiés sous le même angle de vue pour montrer que tout bouge, et pas toujours pour le pire. A travers une balade dans six lieux, «Libération» vous propose de jouer cette semaine au jeu des sept erreurs du paysage.

Menglon envoyé spécial Mais où est passé le village du vieux Menglon, disparu, «déperché» de son mont? 1904-1995: impossible de renouer le fil de cette histoire anachronique. En un siècle, toute trace humaine a été effacée de ce pli préalpin de la Drôme, à quelques kilomètres du massif du Vercors. «La Marne affleure sur les pitons alentour. Pas ici. Dans Menglon il y a "Mencomme dans menhir. Ça indique une élévation. Ce cône vert est celtique, presque maléfique», remarque Daniel Oraud, un jeune du pays. «Dans le pays, beaucoup vont se pendre sur le mont. Deux depuis dix ans que je suis élu», précise Jean-Pierre Bernard, maire du nouveau Menglon, autrefois nommé «le Pied de la vallée». Pourtant, la disparition du vieux village n'est pas due à une force mystérieuse et tellurique. La nature a repris ses droits, mais en douceur. «Depuis quinze ans, on ne voit plus rien. Les genêts, les chardons et les ronces ont grimpé sur les restes de mur. Plus haut, les pins sortent tout seuls à cause du vent», raconte Charles, un agriculteur à la retraite. Au début du siècle, le service de reboisement des terrains de montagne (RTM) a planté des pins noirs d'Autriche, robustes, aux longues aiguilles. «Huit centimètres, contre cinq pour les pins sylvestres qui poussaient beaucoup plus lentement mais faisaient une plus belle lumière», précise Charles. Ces travaux herculéens ont été un succès. La pluie ne roule plus sur les reliefs glabres et décimés depuis le Moyen Age. Fini les inondations synonymes de disette.

Sur le mont, la nature, même sélectionnée par l'homme, n'est pas à l'origine de la disparition du village. Ses racines n'ont couvert que des ruines. «Le vieux Menglon? Personne ne l'a vu hormis quelques anciens qui vont se "soleiller là-haut pendant l'hiver. La mémoire ne s'est pas fixée. Les gens du pays ont voulu oublier leur passé seigneurial», raconte Jean-Pierre Bernard. Au Moyen Age, une chaîne de serfs avait acheminé les pierres de la rivière du Bez jusqu'au mont pour construire le village couronné par une tour de garde. Dans le coin, on a l'esprit libre. Le mont a été un repère de protestants pendant les guerres de religion du XVIe siècle, le village des mineurs du zinc et de l'argent, une cache pour les résistants de la Dernière Guerre.

Sur le seuil de sa ferme, Charles, 85 ans, ancien résistant, se rappelle qu'il fallait monter les victuailles à dos d'âne ou à dos d'homme, que la guerre de 14 a tué cinquante villageois, que l'eau manquait au village d'en haut. Pour les dates, mieux vaut aller voir Joseph Aventure, qui habite une petite maison de retraite dans le village voisin de Luc-en-Diois . «Le village, c'est moi qui l'ai démoli à coups de pelle et de pioche. C'était pas tendre. On était en 1920, j'avais 12 ans et le certificat d'études, et je travaillais pour mon père maçon. Les pierres ont servi à empierrer les routes après 14-18 et à construire quelques hangars. Le bas s'était développé dès 1870», raconte Joseph Aventure. «Si on l'avait conservé, on serait une attraction touristique», regrette Madeleine, sa femme qui allait y garder ses moutons. Aucun café, pas une épicerie: rien n'arrête aujourd'hui les promeneurs.

Les souvenirs de Joseph rallument la mémoire de Charles. Défilent les personnages du vieux Menglon: «Pipette», le tailleur de culottes, Ange Gazoni, le vieux mineur italien reconverti en boucher ambulant, les Barbier, qui tenaient le four communal et «cornaient» ceux d'en bas pour qu'ils montent cuire leur pain en suivant le chemin de la «calade» jusqu'à la place du Barry.